Origines, légendes et significations multiples

Dans l’Antiquité, les Maures désignent les populations berbères d’Afrique du Nord, tout particulièrement celles vivant le plus à l’ouest.

La tête de Maure (à ne pas confondre avec « tête de mort »), quant à elle, est un symbole héraldique traditionnel qui apparaît notamment sur le blason et le drapeau de la Sardaigne, mais aussi sur celui de la Corse. Par le passé, la tête de Maure sur le blason Corse avait également les yeux bandés en signe de « soumission ». Plus tard, le bandeau est représenté sur le front et devient le symbole que nous connaissons aujourd’hui.

Mais quel est le lien entre le peuple des Maures et leur représentation ethnique et morphologique sur divers blasons et drapeaux ? Lorsque l’on fouille davantage, d’autres sources nous indiquent que la tête de Maure, telle qu’on l’a représentée sur les blasons, serait en réalité la tête de Saint-Maurice, un martyr chrétien égyptien d’ethnie « nubienne », serviteur des légions romaines, qui serait mort (décapité !) pour sa foi au IIIe siècle.

Vous vous rappelez que nous avons établi précédemment que les Maures sont un peuple berbère ? Eh bien le nubien et le berbère sont des langues faisant partie intégrante de l’héritage culturel et historique de l’Égypte, se rattachant à des groupes de langues parlées au sein d’ensembles bien plus vastes avec lesquels l’Égypte a entretenu des relations historiques. Comme quoi, le métissage ethnique en Égypte pourrait avoir confondu ceux qui ont canonisé Saint-Maurice le martyr. Ainsi, ce serait donc la tête d’un égyptien (nubien et/ou maure) tranchée par les romains à la suite d’une désobéissance qui devint, dès le Haut Moyen-Âge, un symbole héraldique, d’abord dans les Alpes. La tête de Maure se serait ensuite implantée plus au sud, comme emblème en Sardaigne (4 têtes) et en Corse, à la suite de la domination du roi d’Aragon.

Saint-Maurice, à droite en armure

Revenons à notre Sicile. Que peuvent bien y faire les têtes de Maures ? Y a-t-il un lien entre la représentation mauresque du drapeau à celui de la céramique ?

Si vous allez en Sicile, vous retrouverez ces superbes têtes en céramique un peu partout, sculptées en forme de vases dans lesquelles on y insère des plantes, ou que l’on retrouve sur les tables (en format réduit) pour y insérer des condiments et biscottes lorsqu’on vous sert l’apéro et les antipastis.  Plusieurs commerçants, ainsi que nombre de résidents siciliens, arborent fièrement ces céramiques en tant qu’objets décoratifs et représentatifs de leur culture. Mais pourquoi ?

Quelques légendes siciliennes se cachent derrière ces vases. Une 1ère histoire (légende) parle d’un jeune couple : un Maure et une sicilienne.

Il était une fois, à l’époque de l’occupation arabe en Sicile, dans le quartier arabe de la Kalsa à Palerme, une belle jeune fille qui passait beaucoup de temps à s’occuper des plantes et des fleurs de son balcon. Un jour, un jeune militaire Maure qui passait non loin de sa demeure, la vit et tomba éperdument amoureux d’elle. Il lui déclara son amour, et la jeune femme, surprise et confuse, tomba à son tour amoureuse de l’audacieux jeune soldat. Toutefois, lorsqu’elle apprend que le jeune homme était déjà marié, la nuit précédant son retour au pays, elle le tue en lui tranchant la tête afin qu’ils demeurent ensemble pour toujours. Elle utilisa ensuite sa tête comme pot pour un plant de basilic, symbole de passion et de royauté. La plante devint si belle que les voisins, envieux, commencèrent à façonner des vases similaires pour tenter d’égaler les exploits botanistes de la veuve sicilienne.

Cette histoire n’est d’ailleurs aucunement liée à celle de Saint-Maurice le martyr (évoquée précédemment dans cet article), pas plus que l’histoire qui suit.

Une autre histoire (légende) nous vient cette fois de la ville portuaire de Messina (en Sicile), également porte d’accès au continent, et de ce fait, à l’Italie.

C’est l’histoire d’Elisabetta et de Lorenzo. Elisabetta était fille de riches marchands de Messina. Lorenzo était un beau jeune homme issu d’une famille modeste de Pise, mais également serviteur pour la famille d’Elisabetta. Comme on peut s’en douter, ils tombèrent amoureux. Lorsque les frères d’Elisabetta découvrirent cet amour interdit, ils tuèrent Lorenzo et firent disparaître le corps. Inconsolable, la pauvre Elisabetta trouva le lieu où le corps de Lorenzo avait été caché, trancha la tête de ce dernier et l’emporta avec elle dans sa chambre, puis enfouit la tête de Lorenzo dans un pot de basilic. La jeune femme passa le reste de sa vie à pleurer et à parler à la plante de basilic, jusqu’à sa mort. On ignore combien d’années a duré ce deuil si douloureux.

La Sicile, tout comme la Sardaigne et la Corse sont voisins immédiats du nord-ouest africain, une zone continentale occupée par les arabes depuis des millénaires. L’héritage arabe est d’ailleurs omniprésent en Sicile, autant dans l’art et l’architecture que dans l’agriculture et la cuisine sicilienne. Les légendes mauresques font partie de cet héritage.

On peut se procurer des vases mauresques chez tous les commerçants de céramiques en Sicile, et même de plus antiques dans les marchés aux puces.

Vous pouvez également les commander et vous les faire livrer (par bateau ou par avion) à la maison. Voici une adresse que nous recommandons : Ceramiche D’arte Roma, 5 via Roma, Syracuse

Vous pouvez communiquer directement avec Clarissa ou Mauro via Facebook.  Leurs céramiques sont toutes splendides, pas seulement leurs vases mauresques !

Et ce sont également nos amis ! 😊

Vous avez envie d’en savoir plus sur les traditions siciliennes ?

👉 Lisez cet excellent article publié précédemment sur notre blogue. On y parle notamment des nombreuses fêtes religieuses et de mariages à la sicilienne, toujours très colorées et fastes !